Par Marie-Maude Bossiroy

Le livre Le prisonnier sans frontières de Jacques Goldstyn est cher à mes yeux. Tout ce que ce livre incarne, tout ce que ce livre dit, m’interpelle.

En guise de préambule à l’oeuvre, Béatrice Vaugrante, directrice générale d’Amnistie internationale Canada francophone, signe un mot à propos de l’importance de l’engagement social. « Chaque geste compte », écrit-elle, appelant à l’action. Et c’est bien ce qu’il y a de formidable, avec Amnistie internationale : cesser de n’avoir que de bonnes pensées pour les victimes d’injustices; décider d’agir pour elles.

Goldstyn propose ensuite un court texte abordant sa propre implication avec l’organisme, dans le cadre des marathons d’écriture. Cette activité annuelle d’Amnistie se tient partout à travers le monde. Partout sur la planète, des gens écrivent à des personnes emprisonnées injustement. Goldstyn raconte:

Ce qui me réjouissait le plus était de savoir que ces myriades de lettres et de dessins avaient une chance de parvenir à ces prisonniers. Mieux encore, cet élan de solidarité pouvait contribuer à leur libération.

 

Après les mots d’introduction, se trouve cette dédicace :

Le prisonnier sans frontières

© Jacques Goldstyn « Le prisonnier sans frontières  », Bayard Canada.*

 

La dédicace à la famille Haidar-Badawi est touchante. Elle est surtout nécessaire. Goldstyn immortalise son soutien à cette famille séparée depuis quatre ans et, ce faisant, il s’assure que leur combat ne tombe pas dans l’oubli. Comme le personnage du Prisonnier sans frontières, Raif Badawi n’a rien fait de répréhensible. Il a exprimé des idées. Il a simplement affirmé son désir d’une société plus égalitaire et plus libre. En faisant échos au calvaire, bien réel, de cette famille, la dédicace produit un effet marqué sur la lecture de l’oeuvre de fiction. Elle apporte une concrétude.

Mais ne nous arrêtons pas au paratexte, si intéressant soit-il. Le prisonnier sans frontières livre un discours riche, et ce malgré le fait qu’il soit complètement muet. On voit d’abord un père et son enfant qui se rendent joyeusement à une manifestation. Ça pourrait être n’importe qui, n’importe où. La manifestation est durement réprimée, puis le père est envoyé derrière les barreaux. Il se raccroche à des souvenirs heureux, mais l’on perçoit à quel point l’isolement le fait souffrir.  Un jour, une lettre lui parvient, puis une autre, puis une autre. Ces lettres venues des quatre coins du monde lui redonnent espoir, jusqu’à sa libération. Alors, enfin, le père prend la plume à son tour pour écrire à d’autres victimes d’injustice.

Malgré la dureté du sujet, ce n’est pas une oeuvre sombre ou déprimante. D’une part, une prédominance de jaune et de bleu dans l’imagerie apporte une luminosité. D’autre part, alors que le personnage principal est toujours enfermé, on voit apparaître une panoplies d’autres personnages qui lui écrivent et qui le soutiennent. De fait, l’oeuvre est traversée par la solidarité, une valeur qui se rit des frontières.

Comme je le disais plus tôt, le récit est raconté sans mots, et il s’en passe d’ailleurs très bien. Son caractère muet en fait un album à la portée de tous: adultes, enfants, francophones, anglophones, allophones… Ça en fait une œuvre merveilleusement universelle. 

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© Jacques Goldstyn « Le prisonnier sans frontières  », Bayard Canada.*

Goldstyn a réussi à vous donner envie d’organiser votre propre marathon d’écriture en classe? Consultez le site suivant : http://www.amnistie.ca/site/cartes-voeux/ . Les marathons ont lieu en décembre.

Le livre Le prisonnier sans frontières a été sélectionné pour Prix jeunesse des libraires 2017. Consultez le site officiel ici pour obtenir des pistes d’exploitation pédagogique concernant cette oeuvre marquante.

Pour vous procurer l’album dont il est fait mention dans l’article…

*Extraits diffusés dans l’article avec l’accord de l’auteur-illustrateur.