par Andrée Poulin, autrice jeunesse et collaboratrice spéciale


Lors de la journée littéraire J’enseigne avec la littérature jeunesse du 16 octobre dernier, Jacques Goldstyn a présenté le discours de fermeture. Cet auteur-illustrateur a publié plus d’une trentaine de livres et remporté de nombreux prix littéraires. Il présente son parcours dans le domaine des arts et de la littérature en trois mots clés :  sciences, humour et poésie. Voici un résumé, sous forme de capsules, de sa présentation aussi fascinante que stimulante.

Les artistes ne mettent pas beaucoup de beurre sur leur pain
Lorsque Jacques Goldstyn est au primaire, le directeur de l’école demande aux élèves de la classe ce qu’ils veulent devenir plus tard. Ses amis veulent devenir policiers, pompiers, joueurs de hockey. Le petit Jacques dit : Je veux devenir dessinateur. Le directeur dit, dessinateur technique, c’est très bien. Jacques dit non, non, dessinateur de bandes dessinées, comme dans les Bécassines, les Tintin et le Petit Nicolas. Le directeur dit : ah, tu veux être artiste. Tu ne mettras pas beaucoup de beurre sur ton pain.

« Ça m’est resté dans la tête, dit Jacques Goldstyn. Je ne voulais pas être pauvre, comme mon père avait été pauvre. J’ai donc décidé d’étudier les sciences, parce que ça m’intéressait. »

Étudier les roches et les dinosaures
À l’Université de Montréal, Jacques étudie la géologie, mais continue en même temps de dessiner. Dans son carnet de géologie, il dessine ses profs, des homards, des mouettes, des mollusques. Ses professeurs lui disent : « Sois sérieux. Contente-toi de faire la coupe stratigraphique. »  Le jeune Jacques trouve aussi le temps de faire des caricatures politiques pour les journaux étudiants.

  « J’en raffole, mais ça reste marginal. Je suis sérieux et je reviens à mes études à chaque fois. Si je veux mettre du beurre sur mon pain, je dois étudier consciencieusement. »

Ingénieur ou artiste?
Après ses études, Jacques Goldstyn travaille d’abord dans une mine d’or en Abitibi puis comme géologue pétrolier en Alberta. Il a un bon salaire, mais il n’est pas très heureux. Le pétrole ne l’intéresse pas vraiment.

Un des amis de Jacques lui demande de faire des dessins et de créer des personnages pour une chronique dans Hebdo-Science, appelé le petit Débrouillard. Jacques accepte et cela donne Le petit débrouillard, un livre de 66 expériences qui est devenu un best-seller.
Donc le jour, Jacques Goldstyn est géologue et la nuit, il dessine. C’est très exigeant et il se rend compte qu’il ne peut mener à la fois une carrière de géologue et une carrière d’artiste. Il abandonne la géologie pour devenir artiste à temps plein.

Le plaisir d’expliquer la science
Depuis 40 ans, Jacques Goldstyn collabore au magazine Les Débrouillards.

 « Dans le domaine de la vulgarisation scientifique, je suis comme un poisson dans l’eau. Avec les Débrouillards, j’ai un grand plaisir à vulgariser, à illustrer des textes. Le fait d’avoir étudié en science me donne un avantage considérable. Mais ça demande tout de même un effort.  Des gens me disent, tu fais des dessins pour les enfants, c’est facile. Pas nécessairement. Expliquer des concepts, des phénomènes scientifiques à des jeunes, c’est plus compliqué, car ils n’ont pas toutes les clés. Mais ça fait partie du défi et c’est extrêmement valorisant. Ça demande du recul et du doigté, mais j’aime le défi d’illustrer un texte un peu aride, un peu sérieux.»

Illustrer comme au siècle dernier

« Je suis resté comme au siècle dernier, je travaille avec de l’aquarelle, des stylos, des crayons, du pastel. Cela rassure les enfants, car j’ai à peu près les mêmes outils qu’eux ont à l’école. On peut faire des choses fabuleuses avec l’ordinateur. J’ai essayé, mais je préfère la bonne vieille méthode.»

Les enfants comprennent la censure
L’arbragan a été traduit dans une quinzaine de langues.  Deux pays ont censuré ce livre, à cause de l’illustration du curé en train d’arroser ses fleurs, non loin d’une femme en maillot de bain.

« Mon éditrice à New York a dit, si on garde cette image, on va avoir des ennuis, en Alabama, au Texas, où le livre sera peut-être brûlé. Alors on a publié sans image », explique Jacques Goldstyn. Pour une version du livre publié en Iran, on a ajouté dans l’illustration un drap pour couvrir la femme en maillot.  « Lorsque je demande aux élèves, d’après vous, quelle image a été censurée? Quand je leur explique, ils tombent des nues.  Les enfants comprennent la censure, ils comprennent que c’est quand on empêche les gens de raconter une histoire. »


Pour poursuivre la découverte de cet auteur-illustrateur merveilleux:

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