Par Émilie Furlotte

Au tout début du confinement, lors de ma virée de secours à la librairie (vous savez ce dernier samedi avant que tout ne ferme pour de bon?), en faisant mes provisions littéraires j’ai été attirée par cette belle brique aux couleurs vives et à l’infographie superbe. C’est comme ça que le roman L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges s’est ramassé entre mes mains. Je ne l’ai vraiment pas regretté!

Dès la première page, nous sommes happés par cette aventure en sol russe en pleine 2e guerre mondiale. Nous y suivons les jumeaux Viktor et Nadia, jeunes adolescents qui se retrouvent séparés alors que leurs parents veulent les mettre à l’abri, loin de Leningrad. La narration est bien originale. Nous y lisons les cahiers de Viktor et Nadia, en rouge Viktor est l’auteur, en bleu, c’est Nadia. Au début, ils se répondent l’un l’autre puis, une fois séparés, les carnets s’alternent ainsi que les narrateurs. Dès le début, nous sommes avertis : il y a un intru dans ces carnets, le colonel Gavrilovitch Smirnov prend connaissances des cahiers, tout en les annotant dans la marge. Il devra décider si Viktor et Nadia sont coupables ou innocents, mais de quoi exactement? Alors, est-ce une histoire de guerre? Un peu, mais surtout une formidable aventure où les enfants nous montrent leurs forces et leur incroyable détermination.

Cet hiver, dès que j’ai vu un nouveau roman de Morosinotto, je me suis empressée de le lire. La fleur perdue du chaman de K. a été un coup de cœur instantané. Dans ce tome, nous sommes au Pérou en 1986 et nous suivons Laila. Fille d’un diplomate finlandais, elle souffre d’une maladie rare. Elle se retrouve donc dans un hôpital modeste où elle se lie d’amitié à El Rato, jeune garçon mystérieux. Un vieux journal d’expédition trouvé à la bibliothèque de l’hôpital les mènera bien loin de la ville, à la recherche d’un chaman et d’une fleur aux propriétés miraculeuses. La narration ici aussi alterne d’un enfant à l’autre. Pour la majeure partie du récit, entre Laila et El Rato, mais lorsque d’autres enfants se joignent à leur quête, de nouveaux narrateurs arrivent. La richesse de ce type de narration est indéniable. Cela nous permet de vivre l’histoire dans la peau de chacun des personnages principaux, de changer de point de vue.

Ce n’est qu’à la lecture de ce titre que j’ai su que Le célèbre catalogue Walker & Dawn faisait partie de cette trilogie qui n’est en pas vraiment une. En effet, Morosinotto termine ce 3e roman avec ses remerciements où il explique comment ces trois titres sont reliés : lors de l’écriture du roman Le célèbre catalogue Walker & Dawn, il a eu envie d’écrire deux autres romans qui auraient des similitudes au premier, tout en étant si différents.

Voilà donc que je plonge en dernier dans ce roman qui devait débuter la série. Dans celui-ci, une bande de copains trouve 3 dollars dans les bayous de la Louisiane du début du siècle dernier. Une richesse à l’époque. Ils épluchent le fameux catalogue de vente par correspondance Walker & Dawn. Leur choix s’arrête sur un revolver, un vrai revolver de policier. Ils recevront plutôt une vieille montre cassée. Pour obtenir leur revolver, ils parcourront des kilomètres jusqu’à Chicago, bravant de multiples dangers.

Ainsi, si différents soient ces romans, si semblables sont-ils à la fois. Époques, lieux et histoires éloignés les uns des autres, mais semblables dans les thématiques universelles que sont l’amitié, l’engagement et la loyauté. Dans les trois histoires, nous accompagnons des groupes d’enfants, aux portes de l’adolescence, dans leurs différentes quêtes. Le long du Mississipi, de la Neva puis de l’Amazone, ils croiseront sur leurs routes bien des adultes, mais ce sont eux les maîtres de leur destin, autonomes et si forts. Ingénieux et audacieux, vulnérables et invincibles à la fois.  Quel plaisir pour le lecteur de voir ces enfants grandir sous nos yeux, prendre confiance et devenir autonomes!

Morosinotto s’est amusé tout au long de ces trois histoires à jouer avec le texte et l’infographie. Cartes géographiques, découpures de journaux, annotations manuscrites, photos, calligrammes et plans ajoutent aux récits et rendent la lecture encore plus palpitante. Des éléments fort créatifs que les lecteurs prennent plaisir à découvrir.

Je n’ai pas pu m’empêcher lors de ma lecture de penser à l’atelier donné par Kate Roberts il y a à peine deux semaines au dernier congrès De mots et de craie. Loin de moi l’idée de vous résumer ces deux jours de formations incroyables, mais quelques liens peuvent tout de même vous rejoindre.

Afin de permettre à nos lecteurs de réfléchir à leurs lectures, d’analyser les textes lus et de recueillir les informations permettant de définir les personnages Kate Roberts y présentait la stratégie Read with a pen in hand and traits in head. Crayon en main (et post-il sous la main) les lecteurs prennent des notes durant leur lecture tout en ayant en tête les caractéristiques des personnages. Ces trois romans présentent des personnages si riches et surtout, leur évolution est fascinante à suivre. Les lecteurs y feront sans nul doute des observations de qualité. C’est à l’aide de ces observations que les lecteurs écrivent ensuite dans leur carnet de lecture. Outre en écrivant, ils peuvent rendre compte de leur réflexion à l’aide de lignes du temps, listes de citations, mais mon coup de cœur présenté par Kate est la droite des émotions que voici :

Sur celle-ci, les lecteurs situent différents éléments importants de l’évolution du personnage selon leur degré d’intensité. Ici, j’ai placé les éléments les plus heureux et les plus tristes, en ordre chronologique. Ce sont les éléments qui ont contribué à définir le caractère de Laila.

Si comme moi vous êtes inspirés par ces idées concernant le carnet de lecture, je prévois revenir dans un prochain article avec des exemples de carnets de lecture de mes élèves et d’autres inspirations pour guider nos lectures avec nos lecteurs du 2e et 3e cycle.

Finalement, je vais être honnête avec vous, il me reste encore quelques chapitres à lire dans Le célèbre catalogue Walker & Dawn et je les étiiiiiiiire. Je sais qu’ensuite j’aurai terminé cette série coup de cœur. Encore une fois, la littérature m’aura permis de voyager, de sortir de chez moi. Quel plaisir décuplé en cette année confinée! Je suis un peu jalouse de vous qui pouvez à votre tour plonger dans ces aventures littéraires: bonne lecture!


Pour vous procurer les livres dont il est fait mention dans l’article…