par Marie-Philippe Goyer

Avec ses illustrations vibrantes, mais délicates et son texte poétique à la fois doux et poignant, Taches d’huile saura captiver vos élèves et leur apprendre une leçon importante : être soi-même est la clé pour trouver sa place dans le monde.

Doit-on absolument faire « comme nos parents »?  Est-ce grave de ne pas entièrement leur ressembler ? 

L’été approche à grands pas et avec lui, les enfants passeront plus de temps avec leurs parents. Taches d’huile, écrit par Jonathan Bécotte et illustré par Enzo, est une oeuvre parfaite à lire avant les vacances qui m’a touchée droit au coeur. L’histoire attendrissante d’un jeune garçon et son papa démontre aux élèves qu’il est tout à fait normal d’avoir des intérêts et une personnalité différente de celle de leur famille. Et que malgré ces différences, il est possible de se retrouver et de s’inspirer mutuellement.

Dans cet article, vous apprendrez comment mettre en lumière le plein potentiel de Taches d’huile en :

  1. Découvrant l’oeuvre, tout simplement
  2. Réduisant les obstacles à la compréhension lexicale 
  3. Vous inspirant de la voix imagée de Jonathan Bécotte pour enseigner le procédé d’écriture de personnification

 

DÉCOUVRIR L’OEUVRE

Avant même de tourner les pages, la quatrième de couverture nous révèle la voix imagée et poétique de Jonathan Bécotte, qui sait habilement tricoter notre langue pour en faire ressortir toute sa richesse.

Mon papa, il n’est pas du tout comme moi.

Son monde mécanique est rempli de bruits et de poussière.

Mon univers est tout propre et je n’aime pas les sons trop forts.

Mais lui, dans son quotidien de garagiste, et moi, avec mon âme d’artiste, on se comprend.

On peut être différents et s’aimer tout autant!

 

L’histoire est racontée du point de vue d’un jeune garçon artiste qui affectionne la douceur, la propreté et le calme. Ce dernier établit un parallèle contrastant et poétique entre sa propre personnalité et celle de son papa, un garagiste qui évolue dans un environnement bruyant et en désordre.

‘’Je suis une pomme
Qui est tombée dans un autre verger.

Mon papa se salit les mains chaque jour.
Moi je me les lave aussitôt que je dépasse, Crayola sur le bout de mes doigts.’’ p.4

 

Au fils des pages, on prend part à des petites parcelles de la vie du duo qui transforment tranquillement l’émotion de du jeune garçon envers le lieu qu’est le garage : un endroit finalement plein de poésie et de beauté. Quel défi pour l’auteur !

“ J’ai pris la torche (soudure)
Mon père a mis sa grande sur la mienne.
Grande comme une patte d’ours.
Il a appuyé sur mes doigts :
On a regardé naitre le feu.

C’est son art à lui. Papa est un artiste.” p.18


Les mots sont judicieusement choisis par Jonathan Bécotte et accompagnés par de nombreuses onomatopées illustrant tantôt les bruits du garage, tantôt les battements d’un coeur : Tac! Boum! Bang! Crouic! Zip! Boum, boum…

Les illustrations d’Enzo sont tout simplement époustouflantes. Elles ont une texture vibrante qui attire immédiatement l’attention des enfants. Les couleurs vives et les détails minutieux dans chaque image ajoutent une dimension visuelle éblouissante à l’histoire. Enzo est habile pour nous faire ressentir la tendresse du père et les émotions partagées de son fils.

 

RÉDUIRE LES OBSTACLES À LA COMPRÉHENSION LEXICALE

Je vous recommande d’aborder l’oeuvre collectivement avec les élèves pour faciliter la compréhension qui pourrait être affectée par un grand nombre d’inférences lexicales. En effet, plusieurs mots et expressions sont susceptibles d’être inconnus des élèves : pyrographie, acouphène, tympans, enclume, étrier, javel et les expressions Faire bon ménage, La pomme ne tombe pas loin de l’arbre, tomber sans connaissance, faire le plein.

Également, l’auteur aborde de nombreux champs lexicaux relatifs à : 

  • la mécanique (caoutchouc, carrosserie, pare-brise, capot, suspension, gaz, goudron, soudure, etc.)
  • la médecine (transfusion, patient, pression, consulter, sarrau, fièvre, etc. )

Travailler le sens de certains mots en amont à la lecture serait pertinent. Une idée toute simple ici :

Psst ! Pourquoi ne pas faire le même exercice pour le métier de médecin et comparer les deux univers ?

 

S’INSPIRER DE LA VOIX IMAGÉE DE JONATHAN BÉCOTTE POUR ENSEIGNER LE PROCÉDÉ D’ÉCRITURE DE PERSONNIFICATION

Tout au long du texte, l’auteur utilise brillamment la comparaison pour imager ses propos. Que ce soit en comparant le mécanicien à un docteur qui sent l’essence ou un artiste du feu, le garage à un hôpital, le bruit de l’acouphène à celui d’un pneu dégonflé, l’odeur de l’essence à un parfum, des flaques d’eau colorées à des oeuvres artistiques… Des métaphores explicites ou implicites sont partout et peuvent servir de texte mentor en appui à vos mini-leçons ! J’aime particulièrement les pages 8 à 12 où l’on voit apparaitre, dans la comparaison, le procédé de personnification : 

Vous cherchez un autre album pour observer ce procédé d’écriture et ses effets ? J’adore La belle histoire d’une vieille chose, de l’auteur Louis Émond. 


À ce point-ci, je devrais vous avoir convaincu de découvrir la beauté de cette oeuvre plus en profondeur. Taches d’huiles  ouvrira la porte à des discussions et permettra à vos élèves de comprendre que les différences peuvent être source de richesse. Bonne lecture!