Par Julien Leclerc

Est-ce que je crois au coup de foudre? Pas vraiment…

Est-ce que je crois au coup de foudre littéraire? Absolument!

En fait, je suis tombé plusieurs fois en amour avec cette œuvre de Jean-François Sénéchal, illustrée par Chiaki Okada.

Une première fois lorsque mes yeux se sont posés sur la couverture, un titre tout simple, apposé sur une illustration sublime, tout en douceur, exposant un jeune renardeau réflexif.

Une deuxième fois lorsque j’ai balayé du regard la quatrième de couverture :

Ce matin, je t’écris une lettre. Au-dessus de la clairière, le soleil est timide. La forêt est immobile. Les oiseaux se taisent. Je voudrais te dire…

Un album émouvant et poétique qui aborde les émotions complexes vécues pendant le deuil.

Une troisième fois en lisant la dédicace de l’auteur : «À ma grand-mère. J’aurais aussi voulu te dire… »

Et finalement, tout au long de ma lecture, je suis demeuré le cœur gros et les yeux brumeux devant la beauté qu’offrent le texte et les illustrations.

Quand un tel coup de foudre se produit,  peu de pistes d’exploration pédagogiques me viennent en tête. Certaines œuvres méritent d’être simplement appréciées et tenues très fort contre notre cœur. Et c’est exactement ce que j’ai fait en la lisant. Je me suis retourné vers mon copain les yeux plein d’eau et je lui ai dit : «C’est si beau…»

On y raconte l’histoire d’un jeune renardeau, assis sur un rocher, plume à la main, écrivant une lettre à sa grand-maman à la suite de son départ. Il se rappelle tous les bons souvenirs vécus avec cette dernière: leurs séances d’artisanat, leurs balades en montagne, leurs découvertes inusitées et leurs grandes aventures qui les ont tant rapprochés. Même si cette lettre ne sera jamais lue, pour le petit, écrire lui permet tout de même de vivre ses émotions, de s’exprimer. Écrire lui permet de dire au revoir à sa grand-maman, enfin.

Cet album pourrait être une bonne amorce pour aborder la thérapie par l’écriture, sans nécessairement vous improviser psychologue. L’exemple présent dans Je voudrais te dire est une situation d’écriture authentique : le renard écrit dans le but d’atténuer progressivement sa peine, pour faire son deuil.

Il m’arrivait parfois, comme routine du lundi matin, d’animer la causerie sous forme d’écriture «thérapeutique». Les élèves ne devaient pas me raconter leur fin de semaine, mais bien me raconter comment ils se sont sentis pendant ce bref deux jours de congé qui passe beaucoup trop vite. Nommer les émotions, les reconnaître, les vivre, les valider. Ils pouvaient partager leur écrit au groupe, ils pouvaient me remettre leur journal d’écriture pour que j’en fasse une lecture plus discrète où ils pouvaient tout simplement garder leur écrit pour eux-mêmes. C’est une excellente façon d’apprendre à connaître vos élèves, à comprendre pourquoi certains arrivent moins concentrés que d’autres le lundi matin. Faites l’exercice avec eux aussi, racontez votre weekend en variant les émotions par lesquelles vous êtes passé.es. C’est correc’ de vivre de la tristesse, de l’ennui, de la colère, du dégoût, de la culpabilité, de la peur, de la déception.

Sur ce, je voudrais te dire… de lire cet album!